Nouveau plan de relance de 450 milliards d’euros pour l’Europe

11 Août 2020 | Economie, Union Européenne | 0 commentaires

Plan de relance de l’économie européenne

Historique ! Après quatre jours d’intenses négociations le plan de relance est enfin acté. Validé le Mardi 21 Juillet 2020 par les 27 Etats membres, le sauvetage de l’économie de l’Union Européenne voit le jour. L’accord prévoit une enveloppe de 750 milliards d’euros d’aides dont 390 milliards de subventions aux pays qui en auront le plus besoin.

Le plan de relance européen en détail

Au total, le plan de relance s’élève à 750 milliards d’euros dont 390 milliards seront distribués sous la forme de subventions (dons non remboursables) et 360 milliards sous forme de prêts.

Porté par la France et l’Allemagne, le projet d‘emprunt a été adopté au forceps. Initialement, le projet franco-allemand prévoyait 500 milliards d’euros de subventions et 250 milliards d’euros de prêts. Mais, face au refus catégorique de leurs partenaires européens, la répartition des enveloppes de subventions et prêts a dû être modifiée pour abaisser le montant des subventions à 390 milliards d’euros.

Les discussions ont été tendues avec les pays qualifiés de « frugaux » (Autriche, Pays-Bas, Danemark et Suède). Comprenez par « frugaux », les pays attachés à l’état des finances publiques accusant les pays du sud de « cigales » car n’ayant rien fait pour éponger leur déficit. Ces pays « frugaux » souhaitent donc limiter au maximum la partie subventions du plan de relance.

D’où proviendra cette somme colossale et qui devra rembourser ? Explications.

Dette publique pays européens 2020

Le financement du plan de relance

De 2021 à 2026, la Commission Européenne empruntera 750 milliards d’euros sur les marchés au nom de l’Union Européenne. Le plan de relance sera ensuite déployé dans tous les États membres, surtout dans les plus fragiles économiquement, sous forme de subventions. La somme est à la hauteur des enjeux, les experts prévoyant un recul de l’économie de la zone euro de 9% sur 2020 selon le Wall Street Journal.

Pour la première fois, les États membres vont se regrouper pour emprunter cet argent.

« Le fonds sera financé par une dette commune émise par la Commission européenne, ce qui représente la plus nette avancée de l’Europe vers une intégration et une coopération plus poussées depuis des années, » souligne Esty Dwek, responsable des stratégies de marché de Natixis Investment Managers Solutions.

Pour parvenir à ce compromis, les dirigeants européens se sont engagés à réduire le financement des programmes de l’Union Européenne, ce qu’Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission Européenne qualifie de « regrettable ». En effet, les budgets des subventions allouées à la recherche et à la santé vont être rabotés.

Idem pour le budget du mécanisme de transition juste. Destiné à accompagner les États membres très carbonés vers la neutralité à l’horizon 2050, son enveloppe passe de 30 à 10 milliards d’euros.

Le budget européen dit normal – c’est-à-dire hors plan de relance – ressort à 1074 milliards d’euros contre 1100 milliards attendus par la Commission. Alors qu’il avait donné lieu en février à tant d’empoignades avec les pays dits «frugaux» ( Pays-Bas, Autriche, Suède, Danemark ), le budget pluriannuel est cette fois passé entre les gouttes.

Les «économes», qui ne voulaient pas aller en début d’année au-delà de 1000 milliards, ont dû choisir leur combat.

 

Les « frugaux » convaincus par des rabais

Jusque-là, les Etats « frugaux » refusaient tout endettement commun. Cette question des obligations de dette « corona » en commun (ou « corona bonds ») était au cœur des tractations diplomatiques depuis le printemps.

Pour convaincre les pays « frugaux » de valider un accord, qui devait être approuvé à l’unanimité comme le prévoient les traités, le président du Conseil européen Charles Michel leur a notamment accordé une hausse de leur rabais. Cela signifie que leurs futures contributions au budget de l’UE seront moins élevées qu’actuellement.

Concrètement, il était déjà prévu que les quatre « frugaux » reçoivent ensemble trois milliards d’euros par an. L’accord prévoit une augmentation assez importante. Les Pays-Bas obtiennent 345 millions d’euros supplémentaires par an, faisant passer leur rabais annuel à 1,9 milliard d’euros. L’Autriche recevra 565 millions d’euros chaque année, soit 328 millions de plus que dans le précédent budget.

Le remboursement de la dette

La Commission européenne, c’est-à-dire les 27 pays, va supporter l’emprunt commun. Les 390 milliards d’euros de subventions vont être donnés aux pays les plus fragiles, souffrant le plus de la pandémie et de la crise, en l’occurrence les pays du sud.

Cette solidarité fait d’ailleurs la particularité de ce plan : pour la première fois, tous les Etats-membres, empruntent ensemble pour venir aux secours des pays qui en ont le plus besoin. Cette question de la répartition a justement été extrêmement compliquée à régler lors des discussions de ces derniers jours, car les pays frugaux souhaitaient avoir une quote-part inférieure.

La France exclue de son côté le recours à la création d’impôts pour financer l’emprunt. La crise de 2008, a prouvé qu’une hausse de la fiscalité avait contribué à tuer la reprise. L’exécutif en est conscient et compte tenu du montant engagé, il n’est pas imaginable de faire supporter la crise aux Français via les impôts.

 

40 milliards pour la France

Au titre des subventions, la France tire son épingle du jeu et touchera 40 milliards d’euros pour financer son plan de relance. Les pays du sud, plus en difficultés, toucheront quant à eux un peu plus de 80 milliards d’euros comme c’est le cas pour l’Italie.

Pour aboutir à cet accord, les Vingt-Sept ont multiplié les concessions. «L’accord n’est pas moins bon parce que des concessions ont été faites», a argumenté Emmanuel Macron, ne souhaitant retenir que le côté révolutionnaire de ce plan de relance. «Le monde parfait n’existe pas», a-t-il commenté.

Des aides conditionnées

Mark Rutte, Premier Ministre des Pays-Bas, obtient la possibilité de geler les subventions promises à un pays si le plan de relance proposé n’est pas jugé pertinent ou si sa mise en œuvre est trop lente ou non satisfaisante.

Le respect de l’Etat de droit devient une condition pour l’octroi des fonds. Une réduction ou suspension des fonds européens en raison de violations de l’Etat pourra être décidée par une majorité qualifiée (55% des pays de l’UE) des Etats membres. Cette mesure vise particulièrement la Hongrie et la Pologne, accusées de régulièrement bafouer la liberté des médias ou l’indépendance de la justice.

Cet accord à Vingt-Sept n’est que le point de départ d’un long et périlleux parcours. Il va se décliner dans une cinquantaine de textes législatifs. Comme l’UE va augmenter son plafond de ressources afin de permettre à la Commission d’emprunter cet argent sur les marchés financiers, il faudra aussi l’accord préalable des Parlements nationaux et régionaux de l’UE avant la fin de l’année.

Obtenir ce tampon sera une épreuve pour les coalitions fragiles des pays du nord de l’Europe.